Investissements directs étrangers(IDE), joint-ventures  et transferts de technologie.

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Serigne Ousmane BEYE

 Le Sénégal, comme beaucoup d’autres pays africains, végète dans le sous-développement. A l’heure où un peu partout dans le continent, l’on parle d’émergence, il est utile et nécessaire de poser un débat ouvert et soutenu, par des réflexions objectives, pour enfin baliser la voie vers un vrai développement durable.

Cependant, il nous semble important et intéressant d’explorer des pistes qui peuvent aider à ouvrir des perspectives pour tirer notre économie sur les voies d’une croissance soutenue et d’un développement réel. Compte tenu de la configuration de l’économie mondiale, à l’heure actuelle, le Sénégal ne peut se passer des investissements directs étrangers (IDE). Notre secteur privé pour sa part, gagnerait à nouer des joint-ventures avec des partenaires extérieurs. Si ces deux options sont prises en compte et résolument mises en œuvre, les résultats ne tarderont pas à se faire jour et peuvent aboutir à un transfert de technologie, condition essentielle pour une émergence économique.

Les investissements directs étrangers (IDE).

Les investissements directs étrangers (IDE) ou investissements directs internationaux (IDI), (en anglais FDI pour Foreing Direct Investement), sont les mouvements internationaux de capitaux réalisés en vue de créer, développer ou maintenir une filiale à l’étranger et/ou d’exercer le contrôle (ou une influence significative) sur la gestion d’une entreprise étrangère.

A titre comparatif, le Sénégal traîne loin derrière certains pays destinataires des IDE. Même si les flux en direction de notre pays n’ont pas cessé de croître au cours des dernières années pour atteindre 298.256.720 dollars us en 2013. Dans la même période, le Ghana a attiré 3.227.000.000 dollars us, le Maroc a reçu 3.360.909.924 dollars us et la Côte d’Ivoire (qui sort d’une guerre civile) a enregistré des IDE de 370.991.548 dollars us en 2013.

Les IDE constituent également l’un des principaux indicateurs de l’attractivité économique des pays. Cela est d’autant plus vrai, que l’investissement direct étranger (IDE) correspond à l’ensemble des flux d’investissement effectués par une entreprise dans une filiale située dans un autre pays, que son propre pays.

Au demeurant, pour pouvoir attirer les IDE, il y a des préalables, des conditions. L’environnement des affaires doit être assaini pour permettre au pays de capter une bonne partie des flux financiers destinés aux IDE.

C’est en cela que la notation Doing Business de la Banque Mondiale peut paraître pertinente.

Les investisseurs étrangers sont très regardants par rapport aux notations réalisées par la Doing Business, Standard and poor’s, Moody’s ou Mo Ibrahim. En dehors du climat des affaires, la qualité des ressources humaines est un indicateur non négligeable de l’attractivité d’un pays. Si nous prenons l’exemple du Sénégal, avec les perspectives d’exploitation du pétrole et du gaz dans la prochaine décennie, c’est aujourd’hui que la formation des ressources humaines doit commencer.

Notre pays a besoin de former des cadres, des techniciens supérieurs et des ouvriers spécialisés qui seront en mesure, le moment venu, de prendre en charge l’exploitation du pétrole, ou tout au moins d’y participer de façon déterminante et en même temps être une source de motivation pour d’éventuels investisseurs. Il nous faudra former une masse critique de ressources humaines aptes à occuper de nouvelles fonctions stratégiques dans ce secteur et entreprendre la valorisation de l’or noir et de ses produits dérivés.

Demain se prépare aujourd’hui. D’ici les dix prochaines années, beaucoup d’investisseurs étrangers frapperont à la porte du Sénégal et se bousculeront pour avoir des parts de marché.

Alors, nous ne devrons pas accepter d’exporter la totalité de notre pétrole brut. Le Sénégal devra profiter de toute la chaîne de valeur dans l’industrie pétrolière, en passant par la raffinerie, jusqu’à la fabrication de produits dérivés. Dans cette perspective, le partenariat public-privé (PPP) pourrait nous être utile, si l’on sait que notre pays est insuffisant en ressources financières, en ressources humaines et en technologie.

Des partenariats en joint-venture.

Pour pénétrer un marché à l’étranger, une entreprise peut préférer s’associer avec un partenaire local (entreprise privée, personne publique, etc.), plutôt que de créer seule une succursale ou une filiale. Le recours à une joint-venture donne une certaine « légitimité nationale » à l’implantation, qui bénéficie alors d’un traitement plus favorable que celui réservé aux étrangers. Le partenaire local permet également de bénéficier d’une meilleure connaissance du marché, des pratiques de l’administration et des concurrents.

Le secteur privé national sénégalais n’est pas très développé. Il n’a pas une capacité financière suffisante pour jouer le véritable rôle qui est le sien. Et c’est cela qui fait que de gros marchés lui échappent.

Pour occuper pleinement la place qui lui revient, le secteur privé national doit se réorganiser, se remettre en cause et poser les jalons d’un nouveau départ. Il s’agira d’une part, pour les organisations patronales, les chambres de commerce, les chambres de métier et les organisations du secteur informel, de mutualiser leurs ressources financières, humaines et matérielles, pour optimiser leur chance d’élargir leur part de marché et ainsi gagner plus d’appels d’offres.

Aujourd’hui, le secteur privé semble se complaire dans l’immobilisme. L’initiative doit venir de quelque part, principalement des organisations patronales, même si  l’Etat, a le devoir de les accompagner.

D’autre part, les entrepreneurs sénégalais doivent nouer des partenariats sous forme de joint-ventures avec des investisseurs étrangers. L’Etat du Sénégal, avec le FONGIP, peut encadrer ces joint-ventures. D’ailleurs, les bureaux économiques du Sénégal à l’étranger peuvent et doivent jouer un rôle d’intermédiation et de facilitation entre le secteur privé national et de potentiels investisseurs étrangers. Le chef de l’Etat, le premier ministre et les membres du gouvernement, lors de leurs visites à l’étranger ont le devoir de se faire toujours accompagner par des membres du secteur privé national, pour leur donner l’opportunité de nouer des contacts.

Cependant, des partenariats en joint-venture ne doivent pas sous-entendre des accords léonins, il s’agit ici de partenariat gagnant-gagnant (win-win). Ces relations d’affaires « win-win », sont valables aussi bien avec des partenaires européens, chinois que marocains. Pour ce qui concerne le secteur informel, il doit tendre vers la modernité, en se structurant et entrer dans l’ère du management moderne. Le Sénégal  regorge d’artisans talentueux avec un savoir-faire incontestable. Cependant, un cloisonnement ne peut permettre à nos artisans d’être de vrais créateurs de valeurs. Alors, dans ce secteur aussi, l’Etat doit jouer un rôle d’accompagnement.

Les pouvoirs publics doivent aider les acteurs du secteur informel à se regrouper, à mutualiser leurs diverses ressources et leur savoir-faire. Les menuisiers, les cordonniers, les tailleurs, les maçons et les autres, peuvent et doivent se regrouper pour mettre en place des centrales d’achats, recourir au financement au nom du regroupement et postuler à un appel d’offre, etc. La mutualisation des forces et des ressources dans le secteur informel, peut permettre la réduction des coûts, la réalisation d’économies d’échelles et la minimisation des coûts d’opportunité. Il faut oser entreprendre, mais entreprendre en synergie.

Les transferts de technologie

L’Afrique en général, a besoin d’un véritable transfert de technologie.

Ce sujet est évoqué depuis presque plus de vingt ans, mais sans jamais se réaliser. Pourtant, beaucoup de pays asiatiques en ont bénéficié. Parmi ces pays, on peut citer la Chine, le Viêt-Nam, la Corée du sud, l’Indonésie, la Malaisie, etc.

Dans le cadre des IDE et même des partenariats en joint-venture, il est possible de procéder à des transferts de technologie. Si nous prenons par exemple un marché qui doit être réalisé par une entreprise étrangère, il suffit de spécifier dans le contrat, le recrutement et la formation du personnel local, en l’initiant aux procédés de fabrication ou de production.

Aujourd’hui, pour diverses raisons, des multinationales délocalisent tout ou partie de leurs activités, surtout des domaines d’activités stratégiques (DAS), vers des pays en développement.

En étant proactif dans le processus de prise de décision et la prospective, l’Afrique et le Sénégal en particulier peut bénéficier de ces délocalisations. Au demeurant, comme nous l’avons déjà indiqué, pour accueillir des entreprises délocalisées, il faut remplir certaines conditions.

L’environnement des affaires doit-être assaini, la question de l’électricité doit être réglé, la corruption doit être combattu, la formation des ressources humaines aux nouvelles technologies doit être diligentée. D’ailleurs, tout ceci est inclus dans les indicateurs de certaines agences de notation, comme le Doing business.

 

Serigne Ousmane BEYE

beyeouse@ucad.sn

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