Le monde post-crise : une opportunité pour recentrer l’humain dans son écosystème

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Le monde post-crise 

« Les espèces qui survivent ne sont pas les espèces les plus fortes, ni les plus intelligentes, mais celles qui s’adaptent le mieux aux changements ». Charles DARWIN

La pandémie de la covid-19 a démontré la vulnérabilité et la fragilité de l’espèce humaine. Cette crise sanitaire a mis à nu toutes nos faiblesses en tant qu’êtres humains, et nous a mis en face de nos insuffisances.

Comme l’enseigne l’éthologie, l’homo sapiens se distingue du reste du règne animal, par la complexité de ses relations sociales, l’utilisation d’un langage articulé élaboré transmis par l’apprentissage, la fabrication d’outils, le port de vêtements, la maitrise du feu, etc. L’espèce humaine a traversé les millénaires en faisant preuve de résilience et de congruence. En effet, l’homme a su transcender les épreuves qui se sont dressées durant son évolution, il a pu dompter son environnement, voire son écosystème. Tout cela, au nom de la survie et d’un besoin de perpétuation de l’espèce humaine.

La science et la technologie ont permis à l’homme d’aller sur la Lune, d’explorer la planète Mars et d’autres étoiles, mieux encore, d’envoyer des engins au-delà de notre système solaire. C’est pour dire que quelques soient les difficultés et les contraintes, l’homme est toujours parvenu à surmonter les goulots durant l’histoire de son évolution. Cette crise sanitaire a, plus ou moins surpris les sachant et les savants. Cependant, après l’effet de surprise, la science permettra dans l’avenir, à l’homme de trouver le remède contre toutes les formes de virus et autres maladies. Cela, au nom de l’instinct de survie.

Au demeurant, malgré les progrès de la science et les prouesses technologiques, le monde est confronté à un virus infiniment petit, qui est en train de vouloir saper son humanité.

Le 17 novembre 2019, la maladie à coronavirus apparait dans la ville de Wuhan en Chine.

Trois à quatre mois après, dans le premier trimestre de 2020, ce qui était considéré comme une épidémie, circonscrite en Chine, est devenue une pandémie de par sa propagation à l’échelle mondiale. Ce qui est grave dans cette crise inédite, est qu’aucun remède et aucun vaccin ne sont jusqu’ici découverts et ce, nonobstant le niveau de la science et de la technologie en ce 21e siècle. C’est un virus non détectable à l’œil nu, qui sème la panique et qui nous fait revoir toutes nos certitudes. Nous sommes allés loin dans l’espace grâce à notre savoir et notre savoir-faire, mais, il est temps que nous revenions sur terre et fassions notre introspection collective.

Les limites de la mondialisation.

Pour venir à bout de la pandémie, tous les pays de la planète sans exception, ont pris des mesures de riposte. Parmi ces dites mesures, il y a la fermeture des frontières aériennes, maritimes et terrestres. Ces mesures ont par la même occasion permis de constater des faiblesses, d’une part sur le plan sanitaire, et d’autre part sur le plan économique.

La survenance de la pandémie a montré les limites du système sanitaire, particulièrement dans les pays africains, comme c’est le cas du Sénégal. Les capacités d’accueil des infrastructures hospitalières sont en deçà du nombre de patients à prendre en charge. Et du point de vue de la qualité des soins, le plateau technique ne sied pas. Les appareils respirateurs et les masques barrières ne sont pas suffisamment approvisionnés. Comme nous le voyons, le système sanitaire a donc montré ses limites. Cependant, cette pandémie a pris tout le monde au dépourvu. Aucun pays au monde fusse-t-il développé, n’était suffisamment préparé, pour faire face correctement et mettre en place des mesures de riposte adéquates.

Sur le plan économique, c’est plus que catastrophique. La fermeture des frontières a mis à nu la vulnérabilité des économies des pays en développement. La plus grande part de la consommation des agents économiques est tributaire des importations. Dans les pays développés, la nécessité du confinement a impacté l’activité économique, avec son cortège de chômage et son corollaire de pertes d’emplois.

L’économie mondiale entre dans une période de récession, à cause des effets de la covid-19. Toutes les activités économiques, dans tous les pays, tous secteurs confondus sont à l’arrêt. Les taux de croissance qui étaient prévus avant l’avènement de la crise sont revu à la baisse, de la moitié ou plus des deux tiers des prévisions initiales. L’on peut même craindre pour certains pays une dépression et une décroissance. Cette crise économique, consécutive à la pandémie est plus grave et plus sérieuse que la crise financière de 2008. Certains experts comparent cette période de récession économique, avec celle de la grande crise de 1929, ou tout au moins avec celle de l’après-guerre 1939-1945.

Les crises économiques en ce début du 21è siècle montrent les désavantages de la mondialisation pour les pays en développement. La crise sanitaire a mis en exergue le mercantilisme et les limites de la solidarité internationale, et par la même occasion, nous a montré les limites de la mondialisation.

Désormais, et après cette crise, rien ne devra plus être comme avant. Un monde nouveau doit se constituer, après la période de convalescence.

Pour une nouvelle humanité.

La période post covid-19 doit donner aux Etats l’opportunité de rediriger leurs économies, dans les secteurs qui prennent en compte la centralité de l’humain dans le développement économique et social. Au plan international, les relations entre les Etats devront privilégier le multilatéralisme.

Par la même occasion, l’homme devra se recentrer dans son écosystème. L’homme doit donner beaucoup plus de respect à son environnement, redéfinir ses rapports avec les autres espèces avec lesquelles il partage cette magnifique planète, qu’est la Terre.

Par ailleurs, l’organisation et le fonctionnement de la plupart des institutions internationales sont devenus archaïques. Un nouveau paradigme dans les relations internationales doit être mis en œuvre. Dorénavant, les relations entre les pays, comme au sein des instances internationales doivent mettre en avant la solidarité, et surtout placer l’humain au-dessus de tous les intérêts égoïstes. Comme le dit si bien le président Macky SALL, je cite : « l’humain et l’humanité doivent être au cœur des priorités à l’échelle nationale et mondiale ».

Cependant, la nouvelle vision du développement doit d’abord se réaliser au sein de chaque Etat. Pour ce qui est du Sénégal, une réorientation est impérative dans les politiques sanitaires et économiques.

En effet, une nouvelle politique sanitaire doit être mise en œuvre. Il ne s’agira pas de construire des infrastructures, n’ importe où et n’importe comment, il s’agira plutôt de redéfinir notre carte sanitaire. Les investissements futurs devront être orientés impérativement, dans le relèvement du plateau médical et dans le recrutement et la formation du personnel. Selon madame Matshidiso MOETI, directrice de l’OMS pour l’Afrique de l’ouest et du centre, les services de soins intensifs en Afrique disposent de neuf lits pour un million d’habitants. Le professeur Seydi, chef du service des maladies infectieuses et tropicales de l’hôpital de Fann, avait souligné récemment le dénuement du service de réanimation de l’hôpital de Ziguinchor. C’est l’homme de l’art et l’expert qui a donné son point de vue, qu’il faut respecter, même si ce n’était ni le lieu, ni le moment de se prononcer sur un tel sujet.

Au plan économique, selon la banque mondiale, la récession en Afrique subsaharienne sera entre moins 05,1 % et moins 02,1 %. La banque africaine de développement situe cette récession entre moins 07,% et moins 2,8 %. La commission économique pour l’Afrique, estime pour sa part, une perte de croissance de l’ordre de 1,4 %, soit : 29 milliards de dollars us. L’impact économique de la crise sanitaire est considérable, mais il est plus grave pour des pays dont la consommation repose sur les importations, et c’est le cas du Sénégal. Si les frontières continuaient à être fermées, nous risquerions comme la plupart des pays africains, de connaitre une famine sans précédent.

C’est la raison pour laquelle, notre économie doit être recentrée vers l’autosuffisance sur tous les plans, dans la mesure du possible. Nous devons sortir de cette extraversion économique, et construire une nouvelle vision économique qui réponde réellement aux besoins de nos populations.

Recentrer l’humain dans son écosystème commence certes, par la prise de mesures adéquates au plan national, mais nécessite aussi au plan international des mesures de solidarité. C’est la raison pour laquelle, il faut appuyer le plaidoyer pour l’annulation de la dette des pays africains. Certaines élites doivent se départir du sentiment de complexe d’infériorité et d’un orgueil mal placé. La crise que nous vivons est sans précédent, et nous

ne pouvons pas mesurer exactement son véritable impact sur l’économie, compte tenu de sa durée, que personne ne peut maîtriser. Mieux, il est même souhaitable de demander un plan Marshall post covid-19 pour l’Afrique. Il faut rappeler qu’en 1947, les Etats-Unis avaient lancé le plan Marshall (du nom du secrétaire d’Etat américain de l’époque), pour aider à la reconstruction de l’Europe. Pas moins de seize pays ont ainsi reçu une aide économique. L’Afrique ne demande pas plus, néanmoins, pour des raisons historiques et contemporaines qu’il n’est pas besoin de rappeler ici, elle mérite même plus qu’un plan Marshall.

 

Serigne Ousmane BEYE

 

 

 

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